Le diable se cache dans les détails

NOGENT-LE-ROTROU – CONSEIL MUNICIPAL DU 23 SEPTEMBRE 2021

Remboursement de 3 000 € par la Communauté de Communes du Perche

Un projet du Maire-Président mis à mal …

La qualité des procès-verbaux d’un Conseil Municipal peut se mesurer à sa volonté de transparence et d’information objective des citoyens sur les enjeux et le sens des décisions prises. 

Il est certain que la rédaction du Procès-verbal du Conseil Municipal du 23 septembre dernier ne permet pas aux lecteurs de comprendre ce qui se cache derrière les remboursements par la CDC du Perche à la Ville de la somme de 3 000 €, correspondant au contentieux avec la SCI SAFA. 

Ce contentieux concerne la parcelle cadastrée section AE n° 94, située avenue de la Messesselle à Nogent-le Rotrou.


Ce bien immobilier est propriété de BPCE Lease Immo et de BPI France. Rappelons que Harold Huwart, Maire de Nogent-le-Rotrou, Président de la Communauté de Communes du Perche et Vice-Président de la Région Centre-Val de Loire est également administrateur de BPI France.

Historique. 

11 mai 2020 : la Ville de Nogent-le-Rotrou est informée qu’une transaction est en cours, concernant le bien situé 94 avenue de la Messesselle à Nogent-le Rotrou, entre le propriétaire actuel et une SCI, pour un montant de 150 000 € TTC.

4 juin 2021 : Le Conseil Communautaire est informé du projet de vente et de l’intérêt que présente ce terrain en matière de développement économique. Il décide, à l’unanimité, de :

  • Demander à la commune de Nogent-le-Rotrou, et à son maire ayant reçu délégation, de bien vouloir acquérir par voie de préemption le bien appartenant à BPCE LEASE IMMO, cadastré AE n° 94, d’une superficie de 25 754m², pour un montant de 150 000 € (TTC), auxquels s’ajoutent les frais d’acquisition
  • De céder ensuite ce bien à la Communauté de Communes qui est compétente pour mener à bien le projet susvisé. La Communauté de Communes remboursera à la Commune le coût d’acquisition du bien et les frais d’acquisition

« Ce bien est situé en zone urbaine, à proximité de la gare, dans la zone industrielle de la Messesselle, zone d’activité la plus ancienne gérée par la Communauté de Communes. Le bien est idéalement situé pour permettre la création d’un site économique à vocation intercommunale, à même de soutenir la création et le développement des TPE sur le territoire. Il pourrait accueillir un espace de type ateliers-relais et/ou pépinière d’entreprises et permettre à la Communauté de Communes de débuter la requalification de cette zone industrielle qui comporte plusieurs friches à proximité immédiate du site. Les enjeux de requalification urbaine sont importants sur ce secteur.La localisation sur un site déjà urbanisé et à proximité de la gare constituent des atouts indéniables pour le projet, à même de renforcer l’attractivité économique de la Communauté de Communes, tout en limitant la consommation d’espace. En outre, ce projet s’inscrit dans la continuité du programme Action Cœur de Ville porté par la commune de Nogent le Rotrou et dont le périmètre s’étend jusqu’à la gare. »

Compte rendu du conseil communautaire du 4 juin 2021.

23 juin 2020 : La Ville de Nogent-le-Rotrou exerce son droit de préemption, pour acquérir le bien. La SCI SAFA ne pourra donc pas acheter le terrain.

16 septembre 2020 : Le juge des référés Tribunal Administratif d’Orléans a, sur la demande de la société SAFA (acquéreur évincé), suspendu l’exécution de cette décision (préemption) sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative. La Ville ne peut, en l’état, exercer son droit de préemption. La Ville fait appel de cette décision devant le Conseil d’Etat.

21 mai 2021 : Le Conseil d’Etat décide que le pourvoi de la commune de Nogent-le-Rotrou est rejeté, et qu’elle versera à la société SAFA une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. 

Les arguments développés par le Conseil d’Etat sont intéressants :

« Il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que le juge des référés aurait dénaturé les faits de l’espèce ni, eu égard à son office, commis une erreur de droit en retenant comme étant de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision litigieuse le moyen tiré de l’absence de réalité, à la date de cette décision, du projet d’action ou d’opération d’aménagement l’ayant justifiée, alors qu’il ressort des pièces versées au dossier du juge des référés du tribunal administratif, d’une part, que le programme  » action cœur de ville « , auquel se réfère la décision en litige, s’il prévoit l’aménagement du  » pôle gare « , ne s’étend pas au secteur, situé au-delà de la gare et à l’extérieur du cœur de ville, dans lequel se trouve la parcelle préemptée et ne comporte aucune mesure se rattachant au développement économique de ce secteur et, d’autre part, que le projet de création d’un site économique à vocation intercommunale n’apparaît que dans la délibération du conseil communautaire de la communauté de communes du Perche du 4 juin 2020 décidant de la préemption. « 

Conclusions : Il n’est pas ici question de remettre en cause le bien fondé, ou non, de la décision de préemption, ni la qualité du projet porté par la CDC sur lequel aucun descriptif précis, ni plan de financement n’ont été arrêtés. 

Il n’est pas non plus question de dire que la SCI SAFA a un meilleur projet pour notre territoire.

Mais les péripéties rencontrées par ce dossier, et les coûts générés par le contentieux (frais d’avocats, indemnités versées à la SCI SAFA), démontrent :

  • Que tout dossier demande un travail de fond ne négligeant pas les « détails », 
  • Que les lois et règlements s’appliquent à tous, en toute circonstance,
  • Qu’une argumentation doit être solidement étayée, l’approximation pouvant être fatale.

Souhaitons que ce dossier soit repris, s’il est utile à la collectivité, avec un argumentaire plus charpenté, nous préservant, ainsi, de gaspiller les deniers publics dans des procédures non essentielles et pouvant être évitées.  

Conseil d’État, 1ère chambre, 21/05/2021, 445049, Inédit au recueil Lebon

Conseil d’État – 1ère chambre

  • N° 445049
  • ECLI:FR:CECHS:2021:445049.20210521
  • Inédit au recueil Lebon

Lecture du vendredi 21 mai 2021

Rapporteur

M. Arnaud Skzryerbak

Rapporteur public

Mme Marie Sirinelli

Avocat(s)

SCP ROCHETEAU, UZAN-SARANO ; SCP GASCHIGNARD

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Vu la procédure suivante :

La société civile immobilière SAFA a demandé au juge des référés du tribunal administratif d’Orléans, sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l’exécution de la décision du 23 juin 2020 par laquelle le maire de Nogent-le-Rotrou a exercé le droit de préemption urbain sur la parcelle cédée par la société anonyme BPCE Lease Immo et par la société anonyme Bpifrance Financement, cadastrée section AE n° 94, située avenue de la Messesselle, jusqu’à ce que ce tribunal se prononce au fond sur la légalité de cette décision. Par une ordonnance n° 2003014 du 16 septembre 2020, le juge des référés du tribunal administratif d’Orléans a fait droit à cette demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 octobre et 19 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, la commune de Nogent-le-Rotrou demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cette ordonnance ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande de la société SAFA ;

3°) de mettre à la charge de la société SAFA la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :
– le code de l’urbanisme ;
– le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

– le rapport de M. Arnaud Skzryerbak, maître des requêtes,

– les conclusions de Mme Marie Sirinelli, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Gaschignard, avocat de la commune de Nogent-le-Rotrou et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano, avocat de la SCI SAFA ;




Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par une décision du 23 juin 2020, le maire de Nogent-le-Rotrou a exercé le droit de préemption urbain sur la parcelle cédée par les sociétés BPCE Lease Immo et Bpifrance Financement, cadastrée section AE n° 94 située avenue de la Messesselle, sur le territoire de cette commune. La commune de Nogent-le-Rotrou se pourvoit en cassation contre l’ordonnance du 16 septembre 2020 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif d’Orléans a, sur la demande de la société SAFA, acquéreur évincé, suspendu l’exécution de cette décision sur le fondement de l’article L. 521-1 du code de justice administrative.

2. Aux termes de l’article L. 521-1 du code de justice administrative :  » Quand une décision administrative, même de rejet, fait l’objet d’une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d’une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l’exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l’urgence le justifie et qu’il est fait état de moyen propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision « .

3. Aux termes de l’article L. 210-1 du code de l’urbanisme :  » Les droits de préemption institués par le présent titre sont exercés en vue de la réalisation, dans l’intérêt général, des actions ou opérations répondant aux objets définis à l’article L. 300-1 (…). / Toute décision de préemption doit mentionner l’objet pour lequel ce droit est exercé (…). « . Aux termes de l’article L. 300-1 du même code :  » Les actions ou opérations d’aménagement ont pour objets de mettre en oeuvre un projet urbain, une politique locale de l’habitat, d’organiser le maintien, l’extension ou l’accueil des activités économiques, de favoriser le développement des loisirs et du tourisme, de réaliser des équipements collectifs (…), de lutter contre l’insalubrité (…), de permettre le renouvellement urbain, de sauvegarder ou de mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels « . Il résulte de ces dispositions que, pour exercer légalement ce droit, les collectivités titulaires du droit de préemption urbain doivent, d’une part, justifier à la date à laquelle elles l’exercent, de la réalité d’un projet d’action ou d’opération d’aménagement répondant aux objets mentionnés à l’article L. 300-1 du code de l’urbanisme, alors même que les caractéristiques précises de ce projet n’auraient pas été définies à cette date et, d’autre part, faire apparaître la nature de ce projet dans la décision de préemption.

4. Il ressort des termes mêmes de la décision de préemption que celle-ci mentionne que le bien, objet de la déclaration d’intention d’aliéner, est situé en zone urbaine, à proximité de la gare, dans la zone industrielle de la Messesselle, avec des enjeux de requalification urbaine importants, et que l’opération projetée permettra la création d’un site économique à vocation intercommunale, à même de soutenir la création et le développement des très petites entreprises sur le territoire, ainsi que de renforcer l’attractivité économique du territoire communal et intercommunal. Il suit de là qu’en jugeant qu’était de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de cette décision le moyen tiré de ce qu’elle était insuffisamment motivée s’agissant de la nature du projet justifiant la décision d’exercer le droit de préemption, le juge des référés du tribunal administratif a dénaturé les pièces du dossier qui lui était soumis.

5. Il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que le juge des référés aurait dénaturé les faits de l’espèce ni, eu égard à son office, commis une erreur de droit en retenant comme étant de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision litigieuse le moyen tiré de l’absence de réalité, à la date de cette décision, du projet d’action ou d’opération d’aménagement l’ayant justifiée, alors qu’il ressort des pièces versées au dossier du juge des référés du tribunal administratif, d’une part, que le programme  » action coeur de ville « , auquel se réfère la décision en litige, s’il prévoit l’aménagement du  » pôle gare « , ne s’étend pas au secteur, située au-delà de la gare et à l’extérieur du coeur de ville, dans lequel se trouve la parcelle préemptée et ne comporte aucune mesure se rattachant au développement économique de ce secteur et, d’autre part, que le projet de création d’un site économique à vocation intercommunale n’apparaît que dans la délibération du conseil communautaire de la communauté de communes du Perche du 4 juin 2020 décidant de la préemption.

8. Ce motif suffisant à justifier la suspension ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif, les conclusions du pourvoi à fin d’annulation de cette ordonnance doivent être rejetées ainsi, par suite, que celles présentées par la commune au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la commune de Nogent-le-Rotrou une somme de 3 000 euros à verser à la société SAFA au titre des mêmes dispositions.



D E C I D E :
————–
Article 1er : Le pourvoi de la commune de Nogent-le-Rotrou est rejeté.
Article 2 : La commune de Nogent-le-Rotrou versera à la société SAFA une somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la commune de Nogent-Le-Rotrou et à la société civile immobilière SAFA.
Copie en sera adressée à la société anonyme BPCE Lease Immo et à la société anonyme Bpifrance Financement.

ECLI:FR:CECHS:2021:445049.20210521

Conseil Communautaire du 4 juin 2020

COMPTE-RENDU

6. Développement économique

Délibération n°200604-11 – Préemption sur un bâtiment industriel, avenue de la Messesselle, à Nogent le

Rotrou

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Rapporteur : Guy CHAMPION

La commune de Nogent-le-Rotrou a transmis pour avis à la Communauté de Commune une déclaration d’Intention d’Aliéner (DIA) reçue le 11 mai 2020, conformément à la délibération n°170410-30 – DROIT DE PREEMPTION du 10 avril 2017.

La DIA concerne la vente d’un bâtiment industriel, au 9002 avenue de la Messesselle, à Nogent le Rotrou.

Le bien est composé de 2 bâtiments de 1715 m² et 5437 m², sur un terrain de 25 754 m².

Une transaction est en cours entre le propriétaire actuel et une SCI, pour un montant de 150 000 €/TTC (DIA déposée le 11/05/2020).

Ce bien est situé en zone urbaine, à proximité de la gare, dans la zone industrielle de la Messesselle, zone d’activité la plus ancienne gérée par la Communauté de Communes.

Le bien est idéalement situé pour permettre la création d’un site économique à vocation intercommunale, à même de soutenir la création et le développement des TPE sur le territoire. Il pourrait accueillir un espace de type ateliers-relais et/ou pépinière d’entreprises et permettre à la Communauté de Communes de débuter la requalification de cette zone industrielle qui comporte plusieurs friches à proximité immédiate du site. Les enjeux de requalification urbaine sont importants sur ce secteur.

La localisation sur un site déjà urbanisé et à proximité de la gare constituent des atouts indéniables pour le projet, à même de renforcer l’attractivité économique de la Communauté de Communes, tout en limitant la consommation d’espace.

En outre, ce projet s’inscrit dans la continuité du programme Action Cœur de Ville porté par la commune de Nogent le Rotrou et dont le périmètre s’étend jusqu’à la gare.

Vu l’intérêt général que revêt ce projet à la fois sur le plan économique et urbain, il est proposé de lancer une procédure de préemption du bien.

Considérant que la Communauté de Communes a délégué son droit de préemption aux communes par délibération en date du 07/04/2017,

Après en avoir délibéré, le Conseil Communautaire, à l’unanimité décide :

• De demander à la commune de Nogent-le-Rotrou, et à son maire ayant reçu délégation, de bien vouloir acquérir par voie de préemption le bien cadastré AE n° 94 pour une superficie de 25 754m², appartenant à BPCE LEASE IMMO, pour un montant de 150 000 € (TTC) auquel s’ajoutent les frais d’acquisition,

• De céder ensuite ce bien à la Communauté de Communes qui est compétente pour mener à bien le projet susvisé. La Communauté de Communes remboursera à la Commune le coût d’acquisition du bien et les frais d’acquisition.

• D’autoriser le Président de la Communauté de Communes à signer tous les documents se référant à cette opération.

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